Pendant le mois de dĂ©cembre, j’ai pu participer Ă une maraude de l’Ă©quipe Mobile Rimbaud du Centre Hospitalier de Valenciennes et Ă©changer avec des bĂ©nĂ©voles de l’association Midi Partage en pleins prĂ©paratifs du menu de NoĂ«l. A l’heure oĂą le Covid-19 provoque de nouvelles difficultĂ©s, ces Ă©quipes rĂ©confortent, dialoguent et orientent ceux qui en ont le plus besoin. Rencontre avec celles et ceux qui viennent en aide aux personnes en grande prĂ©caritĂ©.
Midi Partage : Un repas chaud pour créer un lien de confiance

Servir un repas chaud le midi aux plus dĂ©munis dans un climat convivial, familial et d’Ă©coute, c’est la particularitĂ© de Midi Partage, créé en dĂ©cembre 1994. En offrant des plats cuisinĂ©s gratuitement, « on créé du lien, on gagne la confiance des personnes pour pouvoir avancer avec eux. Derrière les repas chauds, il y a une rĂ©elle volontĂ© de suivre et d’accompagner les personnes sur le long terme pour les rĂ©insĂ©rer dans la sociĂ©té » , explique François Bultez, directeur de Midi Partage.
Depuis 2015, l’association est installĂ©e dans l’ancienne Chapelle du Faubourg de Cambrai, Ă Valenciennes dont les travaux, financĂ©s « par des dons et aides variĂ©s », sont en cours de finition. L’Ă©quipe est principalement composĂ©e d’Ă©ducateurs spĂ©cialisĂ©s mais aussi de bĂ©nĂ©voles qui n’hĂ©sitent pas Ă donner de leur temps (cuisinier, chauffeurs-livreurs, …).

700 personnes aux profils variĂ©s, bĂ©nĂ©ficient ici d’une adresse postale : SDF, travailleurs pauvres, jeunes sans emploi, familles aux ressources budgĂ©taires insuffisantes… Une salle complète est d’ailleurs rĂ©servĂ©e Ă leurs boĂ®tes aux lettres. C’est en effet primordial pour pouvoir entamer toutes dĂ©marches administratives comme demander une carte d’identitĂ©, le RSA, la CMU, etc… une Ă©tape nĂ©cessaire pour une rĂ©insertion dans la sociĂ©tĂ©.
Les travaux vont permettre Ă Midi Partage de dĂ©velopper un espace « estime de soi ». On retrouvera Ă disposition des bĂ©nĂ©ficiaires un salon de coiffure, une douche ainsi qu’une laverie. « L’idĂ©e dans cet espace c’est qu’on peut se laver, laver son linge, prendre soin de soi… ça leur redonne confiance en eux », indique François.

« En temps normal, les foyers d’hĂ©bergements d’urgence ferment le matin Ă 8h et ouvrent le soir Ă 18h », explique François. En tant qu’accueil de jour, Midi Partage reste ouvert en hiver, de 8h Ă 18h, afin que chaque personne ait un endroit oĂą se mettre Ă l’abri. Avec le Covid, et toutes les difficultĂ©s qu’il engendre, la plupart des foyers d’hĂ©bergements d’urgence, restent ouverts en journĂ©e. D’ailleurs, durant le premier confinement, en raison des travaux dans la Chapelle, Midi Partage s’est dĂ©localisĂ© dans la cantine scolaire de Maing. L’Ă©quipe, mobilisĂ©e continuellement, prĂ©parait principalement des sandwichs qui Ă©taient ensuite livrĂ©s, avec le camion frigo de l’association, « dans des lieux destinĂ©s Ă mettre des personnes Ă l’abris, comme les hĂ´tels par exemple », rajoute-t-il.
Le traditionnel repas de Noël de Midi Partage, adapté en raison du Covid-19
Habituellement, Midi Partage organise un grand repas de NoĂ«l. Cette annĂ©e, en raison de la crise sanitaire c’est compliquĂ©, alors les membres de l’administration aidĂ©s par quelques bĂ©nĂ©voles ont quand mĂŞme concoctĂ©, dans leur nouvelle cuisine bien Ă©quipĂ©e, un menu spĂ©cial NoĂ«l.
Les plats ont ensuite Ă©tĂ© livrĂ©s dans des diffĂ©rents foyers d’hĂ©bergements d’urgence, ainsi qu’Ă des Ă©tudiants pendant la journĂ©e du 25 dĂ©cembre. La livraison s’est accompagnĂ©e des boĂ®tes de NoĂ«l de « l’opĂ©ration boĂ®tes-cadeaux » lancĂ©e par la commune de Maing. L’objectif Ă©tait d’en rĂ©colter 50. Particuliers, Ă©coles et associations se sont mobilisĂ©s, au total 400 paquets encombrĂ©s la salle de repas de Midi Partage.  » Cette forte mobilisation montre qu’il reste encore un peu d’entraide et de solidaritĂ© aujourd’hui », souligne le directeur de Midi Partage.


Pour rĂ©aliser les diffĂ©rents repas, Midi Partage utilise des produits en fin de vie, rĂ©cupĂ©rĂ©s dans les supermarchĂ©s Ă proximitĂ© comme Carrefour Aulnoy ou bien Ă Metro Valenciennes et transformĂ©s sur place dans le respect des protocoles sanitaires. « On fait des repas grâce aux dons. Parfois, il y en a trop, alors on redistribue Ă d’autres associations qui font du dĂ©pannage alimentaires dans le secteur », ajoute François.

Pour Midi Partage l’aide alimentaire est avant tout une porte d’entrĂ©e qui permet de crĂ©er un espace de convivialitĂ©, une mise en confiance qui dĂ©bouche sur une prise charge, voire une rĂ©insertion, des personnes en situation de grande prĂ©caritĂ©. C’est d’ailleurs aussi par le dĂ©pannage alimentaire, que l’Ă©quipe Mobile Rimbaud du Centre Hospitalier de Valenciennes, partenaire de Midi Partage, crĂ©e un lien de confiance, afin de venir en aide aux personnes dans le besoin.
L’Ă©quipe Mobile Rimbaud du Centre Hospitalier de Valenciennes

Depuis 2000, l’Ă©quipe Mobile Rimbaud du Centre Hospitalier de Valenciennes, intervient auprès des personnes en situation de prĂ©caritĂ© et/ou d’exclusion, dans la rue ou en hĂ©bergement provisoire. ComposĂ©e d’infirmier(e)s, d’un Ă©ducateur spĂ©cialisĂ©, d’un psychiatre et d’une psychologue, cette unitĂ© rĂ©alise des maraudes trois soirs par semaine dans l’arrondissement (lundi, mercredi, vendredi). J’ai eu l’occasion de suivre l’Ă©quipe durant une soirĂ©e.
« Notre mission c’est d’abord de crĂ©er du lien, c’est un public particulier parfois compliquĂ©. Sans ce lien de confiance, on a du mal Ă faire des choses avec eux, Ă les motiver Ă se prendre en charge niveau santĂ©. »
Christophe, infirmier psy de l’Ă©quipe Mobile Rimbaud
« Le lien c’est indispensable pour les prendre en charge », explique Tiphaine, infirmière. Pour le crĂ©er ou bien encore le renforcer voire parfois le restaurer, l’Ă©quilibre est fragile, le lien peut se rompre facilement. L’Ă©quipe rĂ©alise alors des permanences santĂ© au sein des structures d’accueil de jour mais aussi de nuit, ainsi que dans des foyers d’hĂ©bergements d’urgence. « Les deux populations ne se rencontrent pas forcĂ©ment, il y a des personnes qui vont dans des accueils de jour mais pas de nuit et inversement. Les maraudes, avec le dĂ©pannage alimentaire, nous permettent aussi d’aller Ă la rencontre de certains SDF très marginalisĂ©s, qui ne se rendent ni dans les structures d’accueil ni dans les foyers d’urgence, de jour comme de nuit », complète Christophe.
En pĂ©riode de grand froid, les maraudes nocturnes sont renforcĂ©es, pendant celles-ci sont distribuĂ©s de la nourriture, des gants, des duvets, de la soupe…L’Ă©quipe est aussi amenĂ©e parfois Ă soigner, orienter et accompagner les personnes dans des dĂ©marches sanitaires ou bien sociales. « On fait de l’accompagnement mĂ©dical, sanitaire mais aussi social. On donne Ă toutes les personnes qui vivent dans la rue un accès aux soins » prĂ©cise Tiphaine.

En lien avec l’Ă©quipe Mobile Rimbaud, il y a l’EMPP (Ă©quipe mobile de psychiatrie prĂ©caritĂ©), elle permet une prise en charge spĂ©cifique des personnes en situation de prĂ©caritĂ©, atteintes de pathologies mentales. « On travaille sur deux volets, un gĂ©nĂ©raliste et un plus axĂ© sur la santĂ© mentale. L’idĂ©e est de commencer Ă crĂ©er un lien quand il n’a jamais Ă©tĂ© fait », explique Christophe.
Les difficultés engendrées par la crise sanitaire
« Sans les assos, je ne sais pas comment on ferait. »
William, sans domicile fixe
Avec la crise sanitaire actuelle, et la fermeture de certains lieux publics comme les cafĂ©s, les bars, les restaurants ou bien encore les cinĂ©mas, il est de plus en plus difficile pour les personnes en situation de prĂ©caritĂ© de trouver Ă manger ou de se mettre Ă l’abri. « J’ai connu des jours meilleurs on va dire » explique William SDF, Ă Tiphaine lors du dĂ©pannage alimentaire. « Ils sont toujours Ă notre Ă©coute, ça rĂ©conforte. Sans les assos je ne sais pas comment on ferait« , ajoute-t-il.
Depuis septembre, l’Ă©quipe propose des tests Covid aux SDF. Sur le terrain, l’Ă©quipe reste vigilante, « on n’effectue pas directement le test lors des maraudes. On repère des personnes ayant des symptĂ´mes et on les oriente vers des centres d’accueil ou d’hĂ©bergements pour qu’ils passent le test », clarifie Christophe.

Un rĂ©seau d’acteurs efficaces associant des partenaires sociaux et de santĂ©
Pendant les maraudes, l’Ă©quipe Mobile Rimbaud est toujours accompagnĂ©e d’un reprĂ©sentant associatif. Plusieurs membres des associations (SIAO, Croix-Rouge, MĂ©decins du monde, Midi Partage, AJAR et Alter-Egaux), effectuent des roulements sur la semaine. Ce soir-lĂ , c’est Jean-NoĂ«l de Midi- Partage qui a rejoint Christophe et Tiphaine.

« On est partenaire, avec d’autres associations, de l’Ă©quipe Mobile Rimbaud. C’est important pour nous, d’aller au contact de ce public qui est en grande prĂ©caritĂ©, leur apporter un cafĂ©, Ă manger, une couverture, dialoguer avec eux, ĂŞtre Ă leur Ă©coute… C’est vraiment la base du mĂ©tier. »
Jean-Noël, éducateur à Midi-Partage
Cela fait Ă peine un an que Jean-NoĂ«l est Ă©ducateur Ă Midi Partage. Plus jeune, il a participĂ© Ă des actions dans les centres sociaux. Il a toujours Ă©tĂ© actif dans l’associatif, et plus particulièrement auprès des enfants malades.  » Ce domaine m’a toujours attirĂ©, c’est une passion, une vocation. Je regrette de ne pas ĂŞtre parti plus tĂ´t dans cette voix-lĂ . », confie-t-il.
Depuis 20 ans qu’elle existe, l’Ă©quipe Mobile Rimbaud du Centre Hospitalier de Valenciennes « a Ă©voluĂ© dans sa forme, sa structure, au niveau du personnel » souligne Christophe. Bien organisĂ©e et installĂ©e sur l’arrondissement, avec les diffĂ©rents partenaires elle tente d’accompagner les plus fragilisĂ©s pour les aider au mieux.
Ainsi c’est un peu de chaleur humaine que ces brigades mixtes de bĂ©nĂ©voles et de professionnels, apportent aux personnes qu’ils accompagnent. Ces Ă©quipes de terrain mobilisĂ©es toute l’annĂ©e, dans des domaines d’interventions complĂ©mentaires, essayent de recrĂ©er du lien, lors de moments de partage avec un public parfois oubliĂ©, invisible aux yeux de la sociĂ©tĂ©, qui bien souvent l’ignore.

Moi c’est Marthe, je suis Ă©tudiante en troisième annĂ©e Ă l’AcadĂ©mie ESJ de Lille en parallèle d’une licence en science politique. Je dĂ©couvre petit Ă petit l’univers de la photographie, notamment en couvrant des manifestations ou bien des Ă©vĂ©nements locaux. Mes sujets de prĂ©dilection sont ceux qui traitent de l’Ă©galitĂ© des droits entre les femmes et les hommes. J’aime aussi les sujets culturels.
Félicitations,
encore un sujet bien rédigé, bien documenté et très explicite.